Notre coordinatrice était au micro de Bruxelles Matin, pour évoquer les enjeux liés à l’absence de gouvernement à Bruxelles et ses répercussions sur le secteur non-marchand et son financement.
⚠️ Il est crucial de trouver des solutions rapides et durables pour les associations, car sans cela, nous risquons de faire face à des conséquences catastrophiques à court, moyen et long terme. [L’interview démarre à 1h38 du replay]
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Julie Van H
Des dizaines d’associations sont menacées à Bruxelles.
Geoffroy Fabre
Oui on parle souvent du fait qu’il n’y ait pas de gouvernement actuellement à Bruxelles, en tout cas, pas de nouveaux gouvernements, pas de nouveaux projets possibles. Alors très concrètement, on commence à avoir des conséquences depuis une semaine. Des dizaines d’ASBL du secteur non marchand ne touchent plus certains de leurs subsides, des subsides qu’on appelle facultatifs. Zoé Boland bonjour. Alors vous êtes coordinatrice de la fédération bruxelloise de la promotion de la santé. Alors d’abord, simplement pour qu’on comprenne bien de qui, de quel type d’association parle-t-on ?
Zoé Boland
Alors moi, je représente le secteur d’activité de la promotion de la santé, donc ce sont des associations qui sont actives dans un tas de domaines, allant de la prévention à la réduction des risques, la formation, c’est plein de choses, mais le sujet qui nous occupe aujourd’hui concerne aussi l’ensemble du non marchand. À la fois des services sociaux essentiels à la population, tout le milieu des assuétudes, les drogues, la culture…
Geoffroy Fabre
Des associations qui viennent en aide aux sans-abris aussi par exemple ?
Zoé Boland
Oui l’hébergement également tout à fait.
Geoffroy Fabre
Et donc le problème concret, c’est que ces associations fonctionnent quasi exclusivement avec des subsides ?
Zoé Boland
Oui, pour la plupart, on est sur du financement public. Alors effectivement, là, depuis le 1er janvier, il y a eu une solution un peu intermédiaire qui permet aux associations de maintenir leur subside structurel, juste en fait la base, on va dire pour laquelle ils sont financés, même si on fonctionne tous avec des modes de financement très différents. Mais ici, la problématique, elle touche surtout, comme vous l’avez dit, les subsides facultatifs annuels qui, eux pour le moment, ne sont pas renouvelés.
Geoffroy Fabre
De facultatifs in n’ont que le nom, j’imagine, parce que si on dit que ça menace les associations ?
Zoé Boland
Tout à fait souvent, en fait, on met derrière ce nom un aspect un peu plus ponctuel par rapport au projet, mais souvent, ce sont des subites qui se maintiennent d’année en année et qui permettent souvent au projet initial aussi de pouvoir fonctionner.
Geoffroy Fabre
Et alors, on ne comprend pas bien qu’en quelques jours, quelques jours d’absence de subsides peut menacer carrément l’existence d’une association.
Zoé Boland
Oui, parce qu’en fait souvent ce qui se passe, c’est qu’en fin d’année, on rentre des demandes de subsides et pour lesquels on s’attend à avoir une analyse de dossier, et une réponse assez rapidement dans l’année, quant à l’octroi ou non de ce subside qui permet déjà aussi à l’association d’engager des moyens et aussi d’engager du coup des personnes ou de maintenir des emplois sur l’année à venir. Ici, les demandes peuvent être introduites, mais on sait qu’elles ne seront pas lues ni décidées, du coup, un flou total.
Geoffroy Fabre
C’est ça, parce que ça ne veut pas dire que ce sera un nom. Il y a juste un énorme point d’interrogation. Et ce point d’interrogation n’est pas viable ?
Zoé Boland
Tout à fait, parce qu’effectivement, une association qui n’a aucune vision sur est-ce qu’à un moment donné ce subside va pouvoir être octroyé, ne peut pas dégager des fonds pour mettre en place les projets, sachant que la plupart des associations ne fonctionnent pas avec une trésorerie de base.
Geoffroy Fabre
C’est ça, ils n’ont pas beaucoup de sous dans les caisses. Et alors est ce que ça veut dire très concrètement, parce qu’on parle de problématique générale, mais ça veut dire que des gens risquent de perdre leur emploi ?
Zoé Boland
Oui tout à fait. Donc, il y a effectivement des projets qui se sont même arrêtés en 2024, et souvent, les personnes associées au projet ont eu leur contrat qui s’est terminé ici fin décembre 2024, sans vision d’avenir, mais également des projets qui sont parfois récurrents d’année en année, pour lesquels on s’attend effectivement à recevoir ce fameux subside facultatif. Et d’ici, on est dans un flou, donc l’association va à un moment donné être dans le devoir de mettre un préavis.
Geoffroy Fabre
Oui les ASBL ne peuvent pas s’endetter. Et alors donc ça, on parle des gens qui travaillent, mais on parle aussi de tous ces gens qui sont aidé·e·s. Et ça, ça va créer un gros manque ?
Zoé Boland
Oui effectivement, il y a énormément de bénéficiaires qui sont dans un risque de rupture d’accompagnement, ce qui est quand même assez grave. Ça va être aussi des coûts assez monumentaux, c’est une perte d’argent public monumentale.
Geoffroy Fabre
C’est ça parce que des gens qui vont se retrouver malades qui vont se retrouver dans une nouvelle assuétude, qui vont se retrouver sans logement alors qu’ils avaient raccroché à quelque chose, ça va coûter à la société.
Zoé Boland
Oui, pour vous donner un exemple concret, au niveau de la centrale d’achat pour le matériel d’injection stérile, eh bien, il y a 250 000 euros dont on sait qu’ils ne seront pas délivrés, en tout cas en 2025.
Geoffroy Fabre
Est-ce que si un gouvernement, imaginons, c’est parce qu’il se passe pour le moment, mais imaginons que dans deux semaines, le gouvernement est là, est-ce que tout peut se rattraper ?
Zoé Boland
C’est très ambitieux parce que là, par exemple, c’est des financements qui dépendent d’un plan qui n’a pas été du coup réactualisé. Et aujourd’hui, même si le gouvernement arrive en deux semaines, iels ne vont pas régler toutes les situations, même le temps de s’installer. On sait que c’est du matériel qui n’est pas distribué. Donc, en fait, c’est un risque réel de retourner dans les années 90 avec une propagation des maladies infectieuses comme le VIH ou l’hépatite c, qui va être démesuré et donc des coûts de santé à terme qui vont être énormes.
Geoffroy Fabre
En 30 secondes rapidement : Qu’est-ce qu’il faudrait faire tout de suite maintenant ?
Zoé Boland
Alors dans l’idéal, un gouvernement.
Geoffroy Fabre
Mais même ça, ce ne serait pas une solution déjà ?
Zoé Boland
Non, mais en fait, dans l’idéal, la première chose à faire, c’est déjà d’augmenter ces fameux crédits provisoires qui ont été votés au Parlement, là, ils sont pour trois et quatre mois, ce qui est vraiment un flou énorme pour les associations.
Geoffroy Fabre
Pour des projets à long terme c’est impossible.
Zoé Boland
L’idée au moins ce serait de les faire jusqu’à un an, on sait qu’il y a des dérogations qui permettent ça. C’est aussi de voir aussi assez urgemment si le gouvernement en affaire courante a une marge de manœuvre par rapport à tout ça est ce qu’il a la possibilité de débloquer ces subsides. Et puis dans le très grand idéal, ce serait que ces subites facultatifs annuels soient quand même intégrés à cette manne budgétaire et que les associations puissent en bénéficier.
Geoffroy Fabre
Voilà donc quelques appels du coude aux politiques que ce soit le gouvernement actuel en affaires courantes ou le futur potentiel gouvernement. Zoé Boland merci. Je rappelle que vous êtes coordinatrice de la Fédération Bruxelloise de Promotion de la Santé. Merci.
Zoé Boland
Merci.